La Leçon sur l'homicide soutenue publiquement
le 11 juin 1529 par Vitoria à Salamanque, présente
un enjeu à la fois éthique et théologique. Il s'agit,
à partir de l'héritage du commandement biblique «Tu ne tueras
point», de déterminer les droits et devoirs liés à l'impératif de
conservation de la vie humaine et d'essayer de surmonter les
contradictions issues de l'affrontement du commandement
théologique et moral avec l'exigence anthropologique et politique.
Les problèmes de casuistique auxquels cette leçon entend apporter
une réponse entraînent Vitoria sur le terrain juridique et politique
(la guerre, la défense de sa vie, le sacrifice de soi, le suicide,
la peine de mort...) par l'intermédiaire du thème de l'usage
du libre arbitre, de la responsabilité qui en découle et de la
référence au principe de légitimité incarné par le droit naturel.
Vitoria, dans cette exposition, sans tomber dans les errements de la
«belle âme», ni dans l'inefficacité du dogmatisme formel en
morale, rend possible une redéfinition de l'extension et de la limite
du droit à la vie comme droit naturel, aussi bien dans l'ordre
existentiel de l'individualité que dans l'ordre juridique et politique
de la communauté humaine.
Jean-Paul Coujou