Les Leçons sur la jurisprudence sont issues de notes du
cours de philosophie morale professé par Adam Smith
de 1762 à 1764 à l'Université de Glasgow. Alors que
les autres parties de ce cours ont trouvé leur accomplissement
dans La théorie des sentiments moraux de 1759 et dans La richesse des
nations de 1776, ces notes d'étudiants restent l'unique témoignage
d'une théorie de la justice élaborée à partir de la lecture critique
de l'école hollandaise du droit naturel.
Ces Leçons proposent un commentaire synthétique de la théorie
de la justice exposée par Hutcheson en 1742 dans son Philosophiae
moralis institutio compendiaria. Smith se réfère à différentes traditions
juridiques parmi lesquelles il s'efforce le plus souvent de faire
ressortir l'originalité de la common law dans laquelle il voit
le véritable droit naturel. La possibilité d'une justification
intersubjective des attentes mutuelles, mise à l'épreuve du
point de vue du spectateur impartial, tient lieu, pour le droit
privé, du fondement assurant que la nature rejoint la justice.
Par ailleurs, l'histoire devient l'instrument analytique qui permet,
en reformulant certains a priori conceptuels et en s'efforçant de
réinscrire la genèse de la norme de droit dans l'infrastructure
sociale, de proposer une issue à l'alternative opposant les théories
jusnaturalistes et le conventionnalisme juridique. Ces pages
soulignent l'importance de la pensée de Hume et témoignent
de l'état d'avancement des idées de Smith sur l'économie politique
à une époque où son maître ouvrage était encore à l'état d'ébauche.
Dans cet ouvrage qui permet de faire la synthèse de l'oeuvre publiée,
on pourra ainsi découvrir en quoi l'interrogation sur le juste
n'est pas séparable d'une anthropologie historique.
H. Commetti