L'époque contemporaine est celle de la prolifération
des écrans. L'aventure a commencé il y a plus d'un
siècle avec l'écran originel : celui du cinéma. Au
moment où, de la télévision à la vidéo, du micro-ordinateur
au téléphone mobile, des caméras de
surveillance au réseau de la Toile, on assiste à l'avènement de
l'écran global, qu'en est-il de cette nouvelle culture d'écrans ?
La thèse développée ici est que, loin de signer la mort du 7e art,
l'époque du tout-écran enregistre la plus grande mutation jamais
connue du cinéma. Non seulement celui-ci se métamorphose
en hypercinéma autour de trois figures constitutives (excès,
multiplexité, distance), mais il est devenu producteur d'un
monde et, partant, d'une vision du monde.
Tous les autres écrans (télévision, pub, jeux vidéo, vidéo-clips,
Second Life...) sont désormais restructurés par la logique de la
starification, de l'hyper-spectacularisation et du divertissement.
Et même le rapport au monde et à soi n'y échappe pas. Voici que
le cinéma est partout, y compris là où il n'est pas : mode, sport, urbanisme,
arts visuels, vidéomania généralisée portent l'empreinte de
la ciné-attitude.
Faut-il avoir peur de cet âge écranique ? Dans ce livre s'exprime
une autre approche : celle qui considère que les images des temps
hypermodernes ne sont pas synonymes d'appauvrissement de la
pensée, du sensible, de l'esthétique. Le film civilisationnel qui se
joue, ni scénario catastrophe ni happy end, contraint à forger
un modèle inédit d'intelligibilité du cinéma, des écrans, et, plus
profondément, de la culture qui vient.