Auteur d'un vaste Traité des tumeurs, qui a fait date dans l'histoire des recherches sur le cancer, le grand Paul Broca, qui a donné son nom à l'« aire de Broca » , aire du cerveau liée au langage, pouvait aussi s'adonner à de savantes distractions, qu'il ne se proposait pas forcément de publier. Il a composé vers 1855 une réjouissante histoire de la cancérologie, qu'il a écrite à la manière d'Hérodote et de Xénophon, et avec l'humour de Lucien. Traçant la carte des conquêtes de la cancérologie, qui se trouve coïncider avec l'Afrique, terre contemporaine d'explorations, et relatant l'histoire de cette discipline avec les mots de la Bible, dont il écrit une brillante parodie, il manie allègrement l'anachronisme, joue avec les mots, invente aux noms des grands médecins ou cancérologues des étymologies grecques, sans du tout renoncer au sérieux de l'historien, conscient des lenteurs comme des progrès de la cancérologie. Qui sait s'il n'envisageait pas d'écrire un jour son histoire en laisses monorimes, à la manière des chansons de geste ? Les listes de rimes qu'il a dressées et qu'on publie ici le montrent averti des recherches contemporaines sur ce qu'on appelait notre vieille littérature.