La mythologie chrétienne, notamment celle de la Genèse et de la Sainte Famille, produit d'une sublimation de notre expérience primordiale et des imagos parentales, s'est peu à peu laïcisée dans les rites de Noël et de Pâques des sociétés bourgeoises, au point que le culte du petit Jésus et de la Vierge Mère, très vif dans une Italie berceau du catholicisme, s'est inversé en culte de l'enfant-dieu, rédempteur de familles éprouvées par deux guerres mondiales. L'enfance, célébrée comme promesse d'avenir et âge de la poésie par le romantisme, est devenue au XXe siècle la source d'inspiration privilégiée des narrateurs italiens. Aux yeux ingénus de l'enfant, le monde est redécouvert dans sa beauté et sa cruauté, dans sa vérité et dans son mystère. Aux yeux du souvenir, le paradis perdu est miraculeusement retrouvé. Aux vertus d'une condition naturelle - primitive, pure, intransigeante, héroïque - vantée par le romantisme, s'opposent, ou parfois se conjuguent, les vertus théologales d'une figure christique dessinée sur le palimpseste des Évangiles pour sacraliser l'enfance, nouveau mythe d'origine des sociétés occidentales.