Il faut du temps pour naître.
Du temps et des errances, des cris ou des étreintes, des paysages qui ne s'oublieront plus et, parce qu'on n'a pas le choix, des mots qu'il faut aller chercher parmi ceux qui tombent d'un poste de radio, surgissent au détour d'une page ou bavent, exultent, s'offrent à aimer enfin, à haïr parfois, aux lèvres d'une mère.
C'est que l'on ne vient pas plus facilement à la réalité du monde qu'à son imaginaire.
Que tout brûle, tout égare et qu'un vieil enfant assiste désormais, désemparé, au naufrage de celle qui, pleurant, braillant des insanités, chantant à tue-tête ou psalmodiant des phrases folles arrachées à ses songes comme à quelques grands livres, ne lui donna pas que l'incertaine clarté du jour.