Le présent ouvrage porte sur les ressorts de l'entreprise généalogique. L'investigation sur la parenté est un choix, souvent risqué tout l'enjeu étant ici de mieux cerner les implications sociales de cette entreprise, à la croisée de l'individuel et du collectif, en la rapportant à un contexte complexe (culturel, matériel et socio-politique). L'histoire de la généalogie proposée est ainsi clairement distincte de l'étude des formes de la parenté et de la mémoire des familles, notamment élitaires.
Dans la continuité d'enquêtes sociales récentes, cette recherche collective analyse les mécanismes des pratiques généalogiques à partir de quatre thèmes complémentaires: la place de l'événement, le jeu des liens de sociabilité et de dépendance, les supports matériels et les imaginaires de la parenté qui lui sont associés, enfin, les choix éditoriaux. Le choix d'une longue séquence, du XVe siècle à nos jours, permet de réunir une pluralité d'entreprises et d'acteurs qui y concourent, des élites princières et citadines à la noblesse seigneuriale, en passant par le milieu des libraires-éditeurs et des artisans urbains. Si les généalogies étudiées n'ont pas de siècle d'or - déterminé en général selon les critères de l'érudition -, il existe cependant des contextes déterminants, qui sont identifiés à partir d'un large éventail de cas européens, mais peuvent aussi avoir une portée européenne. Aussi la dernière partie du volume est-elle consacrée à une inflexion notable du XVIIIe siècle: le développement européen de grandes entreprises éditoriales qui, mêlant biographies et cultures lignagères, anticipent sur l'apparition du marché généalogique des Who's who et autres Bottins mondains.