Pour désigner les auteurs anciens, grecs et latins, qui le fascinent et qui, plus vivants que fantômes, se penchent sur son règne d'écriture, Pétrarque a une expression précise : les amis secrets. Il l'écrit en plusieurs textes comme la formule heureuse pour parler de ces morts éternels, qu'il espère rejoindre dans quelque paradis - ou champs-élysées. C'est là son souhait et sa prétention : il s'emploie presque désespérément à égaler leur force en faisant l'éloge de leurs vertus. C'est maintenant lui qui me guide pour nommer respectueusement, mais pas sans ironie ai recul, ces amis secrets - nombre d'entre eux étant encore vivants - qui ont façonné la présente main à écrire. Leur amitié est faite de rencontres que la matière du livre rend aussi impalpables que la science des sons ou la vision d'un tableau. Rencontres quotidiennes, sous une forme ou une autre, qui me font espérer avec la même prétention des hommes nouveaux, proches de ce que je tente intuitivement de devenir, traquant comme tout un chacun la lumière dans la pénombre.