Drôle d'époque ces années 68 où vices et vertus nocèrent dans la ferveur
des Trente Glorieuses, avant de se figer dans l'opportunisme médiatique et
comptable des années 80 d'hiver. Et pour une fois l'architecture en était, de
ce vaste Mouvement dont la majuscule traduisait l'effervescence autant que
la diffusion des idées de Mai.
Entre mémoire et histoire, à l'écoute des acteurs à défaut d'avoir pu
rassembler ses propres souvenirs, l'auteur met à nu les racines de la scène
architecturale française contemporaine en retraçant les dernières années de
l'École des Beaux-Arts. S'y croisent les univers et les réseaux, les affiliations
politiques et les jeux d'acteurs, entre une administration d'abord conciliante
puis dépassée par les événements et des architectes en herbe présentant tous
les attributs du «jeune turc» au moment où les méthodes deviennent des
méthodologies ; la forme, un signe ; l'architecture, une syntaxe ; et un courant
architectural, un code.
Alors que l'enseignement de l'architecture se sépare brutalement de la
«profession» sans gagner tout à fait les rivages de l'Université, alors que s'effondre
le «système» des Beaux-Arts remplacé bientôt par celui des concours,
l'élite encore fragile des architectes français emboîte le pas du vaste mouvement
de libéralisation et de décentralisation qui allait si profondément modifier
la société française.