« J'écris les dernières lignes des Châteaux de sable, les dernières pages, la fin du livre. C'est comme si je parvenais à ma propre fin, ma disparition. Je vois se dérouler et s'étendre, se perdre dans le sable du rivage, être bue, n'être plus, la longue vague d'écriture, ce tissu de récit et de rêverie, ces traces de mémoire, ma vie, le miroir de ma vie, inventée, rêvée, réelle, changée en cette parole silencieuse, avant le véritable silence, d'ici-bas. Je vois finir le livre pour lequel longtemps il m'a semblé que j'avais entrepris l'apprentissage de l'écriture, la raison même du chemin, et que j'ai tant de fois différé d'entreprendre. Tous les méandres, tous les sentiers de traverse, les faux devoirs, me détournaient de moi-même. La mer déferle sur le sable comme un oiseau se pose et referme ses ailes. [...]
J'arrive au bord de la fin de ce livre. Je ralentis. J'aimerais que ce livre n'ait pas de point final et qu'il s'atténue jusqu'au silence. »
Claude-Henri Rocquet