Au cours de l'année 1202, Jean Bodel, trouvère à Arras, doit quitter sa ville, ses amis, ses mécènes, pour la léproserie de Saint Nicolas de Méaulens, toute proche. Il compose alors les Congés, long poème d'un réalisme lyrique poignant et digne, sans exemple à cette date. A chacun tour à tour, il adresse ses adieux, ses compliments, sa plainte, n'omettant pas d'évoquer maints souvenirs de la vie heureuse, les regrets, la douleur, la honte qui le tenaillent, les ressentiments qui l'effleurent ; impérieux et discret, au seuil de cet Enfer terrestre il demande qu'on l'écoute et qu'on prenne en considération son état.
La présente édition comporte les 45 strophes de Jean Bodel (dans leur texte d'origine), la première traduction intégrale de ces strophes, due à Sylvie Nève et Jean-Pierre Bobillot, et 7 photographies de Marc Trivier.
Plus qu'une simple traduction, il s'agit d'une double « entremise ». A la traduction « littérale » se superposent, parmi les marges, « échos » ou « scolies », visant, par la recherche d'équivalences formelles et par une sorte de commentaire discontinu, à restituer quelque chose de ce qui autrement, de l'original, se perdrait. A cette tentative, s'associe un travail photographique original, comme autant de strophes manquantes.