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Un jeune homme de 24 ans rentre d’un voyage à travers les capitales d’Europe, où il a multiplié les rencontres d’un soir jusqu’à l’essoufflement. De retour à Québec, il trouve un centre-ville défiguré aux airs de chantier : la voirie est à pied d’œuvre, à chaque coin de rue les marteaux piqueurs claquent. Dans le quartier historique, toutefois, l’ambiance est plutôt à la fête. La capitale célèbre son quatre-centième anniversaire et les touristes affluent, les feux d’artifice éclatent. Francis Fukuyama, qui signait en 1989 La fin de l’histoire et le dernier homme, pouvait bien avoir raison : l’histoire, peut-être, s’est arrêtée. La chute du Mur de Berlin a signé la fin du communisme, les démocraties libérales se sont imposées; et dans le quotidien d’un narrateur qui alterne entre les quarts de travail au resto et les soirées de jeu en ligne, entre la pornographie et cette serveuse du bar qui détonne, point la question de ce que ce serait, aimer quelqu’un.
Dans Les crapauds sourds de Berlin, il est question de la femme, vecteur de cohésion sociale, et de la violence qu’un homme peut avoir à son égard quand son propre désir lui échappe, de la violence qui s’infiltre dans ses gestes sans qu’il le sache, dans des recoins qu’il reste difficile à nommer car les mots manquent. L’histoire interroge la possibilité du couple dans une ville essoufflée, où tout se consomme, à une époque où les rapports sexuels, de plus en plus précoces, sont calqués sur l’imagerie d’une pornographie violente. Que reste-t-il du lien amoureux, dans la société marchande qui est la nôtre, pour les crapauds que nous sommes, assourdis par le bruit des sorties, des corps et des destinations touristiques?