Les deux vies du général Foy
« Guerrier législateur », Maximilien Sébastien Foy (1775-1825) a connu une
apothéose avec ses funérailles qui auraient rassemblé 100 000 personnes sur
le pavé parisien. Partant d'une interrogation sur les raisons de cette affluence,
le présent ouvrage propose la biographie d'un personnage dont l'oubli dans la
mémoire collective questionne sur sa dimension historique.
Le général Foy appartient à une génération qui, optant pour une carrière militaire
dès le début de la Révolution française, connaît une rapide ascension sociale.
Servant dans les armées révolutionnaires puis napoléoniennes de 1792 à 1815,
l'homme a gravi les échelons, mais non sans à-coups. Dénoncé comme « modéré »
en 1793, ce partisan des Girondins n'échappe à la guillotine que grâce au 9 Thermidor.
Mais sa proximité avec le général Moreau le rend suspect aux yeux de
Napoléon Bonaparte, d'autant plus qu'il vote contre le consulat à vie puis contre
l'établissement de l'empire.
Affecté à des postes secondaires, il est envoyé dans la Péninsule ibérique où il
reste de 1808 à 1813, conscient de participer à une « guerre inglorieuse ». L'écroulement
de l'Empire et la Restauration l'amènent à se rallier à Louis XVIII, mais
son attitude pendant les Cent Jours le rend à nouveau suspect aux yeux du pouvoir.
Bifurquant alors vers une carrière politique, élu député de l'Aisne en 1819,
le général Foy devient l'un des chefs de l'opposition libérale. Son talent d'orateur
lui vaut une popularité immédiate. Personnalité du Tout-Paris, il fréquente les
salons, les ateliers des artistes en vue, les théâtres et l'opéra. Ses relations avec le
monde de la banque facilitent son élévation sociale et son enrichissement.
Jean-Claude Caron donne donc à voir les multiples facettes de l'homme public
comme de l'homme privé, défenseur de la liberté et de la propriété, soucieux
d'être un « bon mari » et un « bon père ». Luttant pour que les valeurs de 1789 deviennent
le socle de la France postrévolutionnaire, le général Foy entend qu'elles
garantissent la stabilité sociale et confortent l'hégémonie politique du monde des
notables auquel il appartient. Ni « héros » du roman national ni simple protagoniste
de l'histoire, cet homme au double talent incarne la transition entre deux
époques, quand la France passe de l'Ancien Régime aux débuts du système parlementaire,
par le glaive et par le verbe.