Maître et disciple. Ces mots gardent-ils encore un sens
aujourd'hui, alors que des bouleversements nombreux ont
modifié l'économie traditionnelle des connaissances et
affecté bien des croyances qui ont longtemps fondé la civilisation
occidentale ?
Un libre parcours entre le XVIIe siècle et nos jours révèle,
au fil des récits, des rituels et des pratiques, la profondeur
de sens que ces mots simples contiennent. Des exemples
pris dans des champs disciplinaires multiples
restituent la variété des figures magistrales qui ont leurs
archétypes dans Socrate et l'image du père. Ils traduisent
la diversité et la complexité d'une relation fondée sur le
pouvoir et l'affection, dévoilant «un lien d'âme», quand
ce n'est pas une filiation. Cette relation de personne à personne
apparaît, dans le contraste avec les institutions et
les livres, comme le mode par excellence de la transmission
du vrai savoir : celui qui passe en écoutant le maître
parler et en le voyant travailler ; celui qui ne se paie pas,
mais qui se donne. Une relation ambivalente qui peut figer
les connaissances en orthodoxie et produire des clones
ou, au contraire, liant pour le meilleur la tradition et l'originalité,
engendrer de nouveaux maîtres qui continuent
la longue chaîne du savoir.