Les fleurs artificielles
Création, imitation et logique de domination
L'image de Japonais imitateurs est ancienne : en Europe, elle émerge au XVIIIe siècle. Elle ne concerne pas que la rencontre du Japon avec la culture européenne et elle est aussi le miroir des conceptions de l'art en Occident où la création est la valeur suprême. La première partie de ce livre montre, à travers les discours sur le Japon, comment et pourquoi à l'époque moderne la question esthétique de l'imitation est au coeur des rapports de domination symbolique entre les cultures et, plus largement, entre les hommes.
Les Japonais ont réemployé ce discours, vis-à-vis de la Chine notamment, et ont réagi par le déni, la réactivation de savoir-faire locaux et l'invocation d'un esprit national.
L'analyse d'oeuvres majeures du Japon moderne et contemporain comme Vivre de Kurosawa Akira et Le Voyage de Chihiro de Miyazaki Hayao montre, comment de grands artistes japonais du XXe siècle ont fait travailler ensemble les notions de création et d'imitation, et comment ces approches alternatives, en s'opposant à une vision héroïque et désocialisante de l'auteur, permettent d'assumer, autant que possible, la mort dans la vie.
Michael Lucken est professeur des universités à l'INALCO depuis 2000 et dirige le Centre d'Études Japonaises (CEJ).
Après avoir publié l'Art du Japon au vingtième siècle, ouvrage salué par Kikuhata Mokuma comme un « véritable aiguillon dans l'histoire de l'art moderne japonais », il s'intéresse aux monuments aux morts et à la photographie de guerre. Ce travail trouve son aboutissement dans les Japonais et la Guerre, 1937-1952, ouvrage récompensé en 2014 du Prix Thiers de l'Académie française.
Membre de l'Institut Universitaire de France entre 2010 et 2015, Michael Lucken profite de cette période pour développer une réflexion sur la création à l'époque moderne à travers le prisme négatif de l'imitation en s'appuyant sur la pensée de Nakai Masakazu.