Les Indes et l'Europe
Histoires connectées XVe-XXIe siècle
Les Indes ? Ce sont l'Asie du Sud (Inde, Pakistan, Bangladesh, Népal, Bhoutan, Ceylan et Maldives) et l'Asie du Sud-Est (péninsule dite « indochinoise », Birmanie comprise, guirlande insulaire de Sumatra jusqu'aux Moluques - Indonésie, Philippines, Brunei, Timor -, Malaisie et Singapour constituant une zone de transition).
Pourquoi connecter en une seule histoire l'Europe et ces deux sous-régions, si différentes entre elles ? Les relations culturelles et commerciales qui reliaient étroitement les pays d'Asie méridionale, en particulier le commerce des tissus indiens qui servaient de monnaie d'échange, renforcent chez les Européens, lorsqu'ils arrivent et installent des comptoirs à partir de la fin du XVe siècle, la perception qu'il n'y a là qu'une seule région. Ils l'appellent désormais les Indes.
Alors, c'est l'histoire d'une rencontre ? Au milieu du XVIIIe siècle, la présence européenne revêt une autre dimension avec la colonisation anglaise de l'Inde, espagnole des Philippines, hollandaise de Java. Mais l'Asie du Sud-Est dans sa masse ne passe sous l'imperium de l'Europe qu'à la fin du XIXe siècle. Événement devenu majeur au fil des siècles, cette colonisation donne lieu en Europe à une connaissance anthropologique des langues, grammaires, religions et civilisations asiatiques. En Asie, très précocement, les métissages entremêlent peuples et cultures, et la complexité des interactions interdit à l'historien toute opposition binaire entre Orient et Occident. Les sociétés coloniales elles-mêmes sont la production, commune et conflictuelle, des Européens et des autochtones. Écrire l'histoire de cette rencontre et de ses modalités si variées, tout en rompant avec des historiographies étroitement nationales, est un défi que relèvent Jean-Louis Margolin et Claude Markovits.