Dans les sociétés pluralistes, qui n'ont pas en commun un ensemble de valeurs éthiques, sociales et politiques, l'interprétation juridique est sous tension permanente. Les interprétations justes - c'est-à-dire les interprétations qui reflètent une conception partagée de la justice - peuvent être juste des interprétations ; autrement dit, des interprétations qui correspondent seulement aux aspirations et aux intérêts de differents groupes sociaux. Dans ce livre, Michel Rosenfeld s'affronte à cette crise de l'interprétation juridique. Il présente une évaluation critique des principaux courants de la théorie du droit contemporaine aux États-Unis et en France et propose une approche différente.
L'analyse de Michel Rosenfeld porte aussi bien sur le néo-formalisme, le pragmatisme, la théorie du discours, que la théorie autopoiétique. Elle comporte un examen des thèses des principaux auteurs et notamment de Habermas, Rorty, Posner, Luhmann, Dworkin, Fish et Weinrib. Pour remédier à certaines insuffisances de ces thèses, il propose la théorie du pluralisme compréhensif, fondée sur une conception matérielle du pluralisme. Cette approche transforme le fait du pluralisme en un principe normatif. À partir des intuitions de la déconstruction, il répond à cet appel de Derrida, auquel on n'a pas prêté une attention suffisante, à un engagement à combler la distance entre soi et l'autre, sans sacrifice de l'un ou de l'autre.
Michel Rosenfeld montre que la théorie du pluralisme compréhensif permet de surmonter les limitations du libéralisme, du républicanisme et du communautarisme, tout en évitant les apories du monisme et du relativisme. « Les interprétations justes » est un outil pour s'orienter et sortir des labyrinthes théoriques et, à ce titre, il s'adresse à ceux qui s'occupent de théorie du droit, de droit constitutionnel, de philosophie sociale, de science politique ou de théorie critique, comme à ceux qui, à partir de points de vue disciplinaires divers, s'intéressent aux textes, à l'interprétation et qui partagent, dans une perspective postmoderne, le souci de la justice.