Vus d'Occident, avec leur tintinnabulant placard de médailles, leur énorme casquette et leur air sinistre, ils faisaient peur ou faisaient rire. On sait, assez vaguement, qui sont Joukov, Koniev ou Rokossovski, le trio vainqueur du IIIe Reich. Mais les quatorze autres maréchaux de Staline demeurent de parfaits inconnus. Pour quelle raison ont-ils accédé à la plus haute dignité ? Qu'en ont-ils fait ? Que reste-t-il d'eux dans la mémoire des anciens peuples soviétiques ? De la part des historiens, ces hommes méritent mieux que cet oubli abyssal qui contraste si fort avec le respect et l'intérêt qui entourent aujourd'hui encore les noms d'Eisenhower, Montgomery ou Patton. De près ou de loin, la phalange des dix- sept a construit l'Armée rouge, l'a conduite à la victoire en 1945, a installé le communisme à l'est et au centre de l'Europe et bâti la puissante armée soviétique de la guerre froide. Certains, à l'instar de Toukhatchevski, étaient des visionnaires, d'autres, tels Vorochilov ou Koulik, des séides du dictateur. Exposer ce qui les unit et ce qui les sépare permet une formidable plongée à travers l'histoire de l'Union soviétique, de la guerre civile à l'aube de l'ère Brejnev. Chacun de ces dix-sept soldats possède une histoire singulière, marquée bien souvent par de terribles drames : la prison, le camp, la torture, la disparition de proches, la disgrâce, parfois le peloton d'exécution. Forts de sources soviétiques inédites, Jean Lopez et Lasha Otkhmezuri donnent enfin un visage aux maréchaux rouges et leur rendent toute leur place dans la terrible et fascinante expérience qui a secoué le monde de 1917 à 1989.
Un ouvrage novateur. Une somme exceptionnelle.