L'islam et les musulmans, même les plus résolument dogmatiques, théoriciens, activistes ou simples militants, n'échappent pas aux impitoyables griffes du Capital. Pis, ils sont généralement les servants relais, sinon serviles, conscients ou inconscients, d'une doxa capitalistique qui ne dit pas son nom. Souvent, les figures de l'islam étudiées, connues (à l'instar de Tariq Ramadan) ou moins connues, militent pour une offre religieuse « intégraliste », ouvertement antimoderne ou, de manière plus nuancée, critique de la modernité, au travers de certains effets jugés pervers du point de vue de la Loi religieuse. Mais tout en développant et entretenant en parallèle des attitudes et un imaginaire capitalistiques. Rares alors sont ceux qui, parmi elles, adoptent une vision et un comportement radicalement anticapitalistes au nom d'une foi musulmane moins matérialiste que spirituelle. Des résistances s'organisent bon gré mal gré. Toutefois, de manière plus significative, l'adoption d'un ethos capitaliste, avoué ou non, ne signe en rien la fin de la critique politique, et encore moins la dissolution de l'idéologie islamiste et le triomphe d'un individualisme supposément émancipateur. C'est sur la base d'un examen théorique et empirique de quelques personnalités du champ islamique national et arabe que cette réflexion se fonde en grande partie. Une constante semble nettement se dégager : un ancrage particulièrement marqué à droite, voire à l'extrême droite, un attrait aiguisé pour l'argent et les bénéfices, et un rigorisme moral à toute épreuve !
Le capitalisme ou le nouvel esprit capitaliste est incontestablement un rouleau compresseur. Rien ne semble pouvoir l'arrêter ni même lui résister, y compris depuis les lieux saints de la religion musulmane en Arabie Saoudite. Ce pays est le carrefour arçhétypal de toutes les contradictions et excès observables chez de nombreux musulmans politiquement engagés : temple du despotisme dynastique, du littéralisme religieux, du consumérisme, du capitalisme et... de la piété !