Le Codex 1889 de la bibliothèque Casanatense à Rome est composé de 76 doubles feuilles, peintes par un artiste indien anonyme au milieu du XVIe siècle et légendées en portugais. Il donne à voir une galerie de portraits des peuples de l'océan Indien, puis de l'Insulinde jusqu'à la Chine, qui correspondent aux contrées où les navires portugais étaient parvenus depuis 1498 en y fondant parfois des comptoirs et des embryons de sociétés métisses.
Les belles aquarelles aux couleurs vives représentent en général un couple d'une même région ou caste, mais aussi des scènes de groupes (mariage, décès, procession religieuse) ou de la vie quotidienne des paysans et des artisans. L'attention portée aux vêtements et aux tissus est remarquable. Grande partie des images concernent les peuples de l'Inde : les hindous, appelés « gentils » et les musulmans, mais aussi des juifs et des chrétiens malabars sans oublier les colons portugais.
Le Codex 1889 est un exemple fascinant, unique en son genre, de la rencontre entre les mondes européens et orientaux à la Renaissance. Les conditions de l'élaboration du Codex, son possible commanditaire, sa destination demeurent nimbés de mystères dont Sanjay Subrahmanyam explore les arcanes. Quoi qu'il en soit, on peut être certain qu'il est le produit d'une rencontre hors du commun il y a presque cinq cents ans entre plusieurs cultures visuelles et textuelles, qui ont laissé leurs empreintes sur ses pages et continueront de nous fasciner.