Presque deux cents ans avant l’arrivée en France de près d’un million de Pieds-Noirs contraints de quitter l’Algérie, l’administration française avait déjà dû faire face à une première vague de rapatriement de colons. Entre six mille et huit mille réfugiés venus du Canada et de l’Acadie arrivèrent dans divers ports français en 1758. « Toutes vos terres et habitations, bétail de toute sorte et cheptel de toute nature, sont confisqués par la Couronne [britannique], ainsi que tous vos autres biens, sauf votre argent et vos meubles, et vous devez être vous-mêmes enlevés de cette Province qui lui appartient. » L’ordre de déportation du lieutenant-colonel John Winslow était sans appel. Alors que l’Acadie était définitivement passée aux mains des Anglais en 1713, la reprise des hostilités entre la France et l’Angleterre lors de la guerre de Sept Ans conduisit à la déportation systématique des Acadiens. Après leur arrivée en France, le gouvernement met en place diverses mesures, notamment des projets de défrichement ou encore la distribution de secours journaliers de six sous. Mais l’intégration de ces réfugiés dans la population métropolitaine ne sera pas aisée. Progressivement, les voix de différents administrateurs s’élèvent contre la prétention des réfugiés de former un « corps de nation », solidaire et récalcitrant. L’irrégularité du versement de la solde, les retenues et les retards fréquents, tout comme les inégalités entre réfugiés, voilà ce qui caractérise leur sort en France. Parviendront-ils à réintégrer la mère patrie ?