Un savant disparu réapparaît dans un kibboutz pour être aussitôt
assassiné. Qui était-il et qui l'a tué ? C'est le thème d'une courte
fiction découverte dans les archives de Norbert Wiener (et publiée ici).
À partir de cette fiction, Pierre Cassou-Noguès tente de reconstituer
le parcours et les dilemmes de ce savant singulier. Voyageur infatigable,
penseur versatile, mathématicien autant que romancier, Norbert
Wiener invente à la fin de la Seconde Guerre mondiale, sous le terme
de cybernétique, une nouvelle façon de conjuguer l'humain et la
machine. Tantôt séduit par ses propres créatures, comme Pygmalion,
tantôt effrayé par elles, comme le Dr Frankenstein, le savant hésite
et se cache derrière d'innombrables écrans. L'enquête nous mène
du cabinet de Freud jusque dans le cerveau des usines automatiques
et certains cauchemars d'E. A. Poe. On y rencontre des détectives,
des robots, des savants fous et d'autres qui ne le sont pas du tout,
des sorciers, des machines qui travaillent, d'autres qui dansent et
jouent, un corbeau, des cyborgs, des posthumains.
La question, finalement, est de savoir si l'humain survit dans cet
avenir incertain qui est maintenant le nôtre. Ou bien l'humain a-t-il
été éliminé ? Et si c'est le cas, est-ce mal ? Et par qui a-t-il éliminé ?
Les savants, leurs machines ou une idéologie du travail qui sous-tend
le capitalisme aussi bien qu'un certain marxisme ?