« Je m'appelle Ioulia La Perdrix. Mon récit commence il y a près de cent ans, à l'époque où Iaroslav le Juste siégeait sur le trône de Bohen. Sur les hauteurs des monts des Sicambres, par une glaciale nuit d'hiver, une abbaye brûlait... »
Je vais vous raconter comment l'Empire est mort.
L'Empire de Bohen, le plus puissant jamais connu, qui tirait sa richesse du lirium, ce métal aux reflets d'étoile, que les nomades de ma steppe appellent le sang blanc du monde. Un Empire fort de dix siècles d'existence, qui dans son aveuglement se croyait éternel.
J'évoquerai pour vous les héros qui provoquèrent sa chute. Vous ne trouverez parmi eux ni grands seigneurs, ni sages conseillers, ni splendides princesses, ni nobles chevaliers... Non, je vais vous narrer les hauts faits de Sainte-Étoile, l'escrimeur errant au passé trouble, persuadé de porter un monstre dans son crâne. De Maëve la morguenne, la sorcière des ports des Havres, qui voulait libérer les océans. De Wens, le clerc de notaire, condamné à l'enfer des mines et qui dans les ténèbres découvrit une nouvelle voie... Et de tant d'autres encore, de ceux dont le monde n'attendait rien, mais qui malgré cela y laissèrent leur empreinte.
Et le vent emportera mes mots sur la steppe. Le vent, au-delà, les murmurera dans Bohen. Avec un peu de chance, le monde se souviendra.