Quelques jours avant Noël, le 21 décembre 1793, Jean Antoine de Beauvalet, seigneur de Durécu, est trouvé mort à Valognes, dans une chambre où il s'est réfugié, après avoir été enfermé par les Révolutionnaires dans les geôles du fort de la Hougue. Ainsi s'éteint le dernier représentant mâle de la branche noble des Beauvalet, fondateurs, en 1686, du petit domaine de Durécu à Saint-Vaast-la-Hougue, et ayant lutté pendant trois générations, pour conserver leur noblesse chèrement acquise.
Après trois ans de recherches dans les archives nationales, civiles et militaires, départementales (50, 57, 76), municipales, notariales et familiales, Edmond Thin nous dévoile l'histoire totalement inédite du manoir de Durécu et de ses habitants successifs, depuis 1686. C'est une véritable saga, particulièrement vivante, se déroulant sur plus de quatre siècles, celle de trois familles, gentilshommes campagnards puis simples notables, tous très impliqués dans la vie sociale de leur temps, sans oublier leurs épouses, femmes souvent remarquables.
Edmond Thin nous fait découvrir tout d'abord la vie quotidienne et l'ascension sociale progressive d'une famille de laboureurs « manieurs d'argent », devenue noble en 1702, puis confrontée aux problèmes économiques de son temps, dont la banqueroute de Law, ce qui ne l'empêche pas d'accroître régulièrement son patrimoine foncier. A l'époque troublée de la Révolution, son représentant n'hésite pas, au péril de sa vie, à protéger les activités des prêtres réfractaires. Au XIXe siècle, ses descendants par alliance, après s'être occupés de fortifier les îles Saint-Marcouf contre les Anglais, exercent les fonctions de premier magistrat de la commune, sous l'Empire, puis à nouveau pendant la Restauration et sous le Second Empire. Enfin, au XXe siècle, Durécu est acquis par le représentant d'une très ancienne famille saint-vaastaise de négociants et armateurs.