A M. Auguste Barbier
Parce qu’à l’heure où je vous parle l’Arno se traîne huileux et triste, que d’étiques voitures promènent à la lune leurs armoiries, et que les vestes blanches inondent le pont de la Trinité ;
Parce que ces bancs fourmillent d’abbés, de journaux et de marchandes l’œillets ;
Qu’aux mornes charmilles Boboli chaque grotte est sans amour, et chaque jet d’eau sans voix ;
Qu’il s’échange enfin à cette heure de nuit peu d’échelles, de stylets et de mouchoirs ;
Que tout ce peuple d’ennuyés bâille aux étoiles malgré Vestri dans l’Ajo, et la Ungher à la Pergola ;
Il n’en faut pas conclure, gentils étrangers, que la seigneurie de Florence ait toujours eu ce flegme bourgeois et flamand, qu’elle n’ait point mis de fard ou porté de masque au visage ; elle, noble dame à satin et cotte de mailles, toute de fleur et de fer ; toscane par la fierté, et moresque par le plaisir : elle, la cité d’amour de l’Arioste, la ville aux grands arbres, aux ducs de bronze, austère et ridée ainsi que Machiavel !
Fruit d’une sélection réalisée au sein des fonds de la Bibliothèque nationale de France, Collection XIX a pour ambition de faire découvrir des textes classiques et moins classiques dans les meilleures éditions du XIXe siècle.