L'expérience mystique de la passion du Seigneur est sûrement
un facteur d'importance déterminante dans la spiritualité chrétienne
; elle en constitue une forme de réalisation extraordinairement
riche de contenu théologal, de communication de Dieu à
l'âme, de transformation de l'âme dans la communion divine et,
enfin, de renouvellement et d'accroissement de zèle prophétique et
apostolique pour le salut du monde.
«Croix et salut sont des termes corrélatifs et qui se rejoignent
dans les notions de rédemption et de sanctification chrétienne. Si
le fidèle sait bien que ce n'est pas la souffrance comme telle qui le
rachète, mais l'amour de Dieu qui l'a sauvé, il sait aussi que l'amour
du Père s'est révélé et communiqué à lui par la passion de
son Fils» (Dict. de Spir., 12, col. 312).
C'est cet amour du Père et du Fils que Marie Madeleine de Pazzi
(Florence, 1566-1607) contemple ; c'est cet amour inouï qui la fait
sortir d'elle-même et la fait si intimement et si amoureusement
participer aux souffrances de son Époux. Ce qui est au coeur de l'expérience
de notre sainte n'est ni la douleur ni la joie qu'elle peut
ressentir, mais l'ineffable union avec le mystère insondable de l'amour
de Dieu, mieux l'union personnelle avec le Christ, et le partage
le plus large possible des expériences humaines les plus profondes
de sa destinée tragique et glorieuse.
Ce qui en Marie Madeleine parvient à un sommet d'extraordinaire
intensité n'est que la dynamique essentielle de toute vie
chrétienne. Tout fidèle est appelé à prendre part aux souffrances du
Christ, à porter sa croix et à marcher sur les pas de son Seigneur
(frère G. M. Tuveri, extrait de l'introduction, p. 7).