Les mutilations sexuelles inspirent un intérêt toujours renouvelé, tant elles éveillent les fantasmes. Mais l'excision ou l'infibulation dont on parle le plus souvent ne sont pas les formes de violence les plus répandues. D'autres formes existent qui, parce qu'elles sont moins exotiques et moins sanglantes, n'attirent pas autant l'attention des féministes, des militants des droits de l'homme ou des professionnels de la santé. Elles ont pourtant un impact plus profond et quotidien sur l'exposition au virus du sida, sur la sexualité des individus et leur insertion sociale.
S'agissant du sida, le Cameroun est considéré comme un pays à prévalence intermédiaire, si on le compare à l'ensemble de l'Afrique subsaharienne. L'évolution du fléau indique cependant que les conséquences seront sévères à court et moyen terme sur l'ensemble de la population. S.C. Abega étudie la sexualité au Cameroun sur une longue période qui va de l'époque précoloniale à l'époque contemporaine. La vulnérabilité croissante au VIH s'explique selon lui par des violences sexuelles mutiformes liées au système étatique et à ses agents qui usent de leur pouvoir. Les jeunes et les femmes en sont les premières victimes.
« J'ai essayé, écrit l'auteur, de trouver un thème unificateur à l'ensemble de mon livre : celui du contrôle du corps. Les individus ont une faible emprise sur leur corps à cause du modèle mis en place avant la colonisation, et qui se maintient, y compris au sein de l'État indépendant. Un individu qui n'est pas entièrement maître de son propre corps ne peut pas disposer de moyens suffisants pour éviter la maladie, ce qui expliquerait la hausse continuelle des taux de séroprévalence. »