On a parfois le sentiment, dans la vie quotidienne, d'être
soudain à l'intérieur d'un film ; ou bien qu'un film s'est emparé
de notre part la plus secrète et l'expose à nos yeux en même
temps qu'aux yeux des autres, sur un écran. Ingmar Bergman,
mieux que tout autre cinéaste, a mis en relation le cinéma avec
sa «chambre crépusculaire». C'est en sa compagnie, avec son
aide, que j'établis des relations, «les yeux fermés», c'est-à-dire,
avec les yeux du souvenir, entre le cinéma et la littérature qui
comptent pour moi, les livres que j'écris et ma biographie. Une
circulation plus intuitive que rationnelle, moins théorique que
destinée à faire signe, et susciter chez le lecteur un travail
mémoriel analogue.
Marie Étienne