Les systèmes du savoir absolu sont nos modernes pyramides : édifices
énormes et fragiles, elles abritent un sujet qui, occupant la place du
mort, est censé vivre d'une meilleure vie. Ces montagnes nous
surplombent et nous fascinent : nous nous effrayons de leur taille et,
sceptiques, doutons que la momie puisse connaître des jours meilleurs.
Les pillards sont passés par là : les bijoux ont disparu, certains blocs ont
servi à construire de modestes demeures, et bien souvent l'explorateur,
entrant dans la chambre du roi, ne trouve qu'un espace vide.
En 1793, le roi est mort, exécuté par ses anciens sujets, et depuis ce
jour le trône est resté vacant : désormais, le pouvoir ne peut s'énoncer
qu'à partir d'une place vide et il revient au philosophe, qui doit mettre
hors-circuit le sujet du savoir, de dire la vérité du pouvoir.
Le présent livre, qui a pour ambition d'élaborer une herméneutique
du savoir absolu, tente d'élucider les systèmes de l'idéalisme allemand
(Fichte, Schelling, Hegel) à partir du rapport du sujet au discours qui en
constitue la condition de possibilité.