Cet ouvrage s'intéresse à trois romans - À la recherche du
temps perdu de Marcel Proust, Die Schlafwandler (Les
Somnambules) de Hermann Broch et U.S.A. de John Dos Passos -
très marqués par la présence de théorie, au point qu'ils ont
semblé remettre en question « l'équilibre traditionnel de la forme
romanesque », alors qu'il est possible de démontrer, au contraire,
la nature fictionnelle de passages généralement considérés
comme « de l'essai » (ou « de la philosophie ») par les critiques.
L'ouvrage envisage tout d'abord les raisons de cette assimilation,
par une comparaison entre des essais publiés dans les
domaines allemand, américain et français au cours des années
1910-1930 et les passages essayistiques des trois romans, pour
conclure que les points de convergence ne permettent pas de
considérer que ces passages théoriques relèvent d'un genre différent
de celui de l'oeuvre qui les accueille. On propose alors de
voir les séquences essayistiques comme des essais fictionnels,
dont la fictionalité est mise en lumière par un examen des lois, de
l'interaction entre passages diégétiques et essayistiques, des
exemples empruntés à la diégèse par les séquences essayistiques,
ou encore par la mise au jour d'une instance unique et fictionnelle
prenant en charge récit fictionnel et discours essayistique.
S'éclairent alors les enjeux de l'essai fictionnel, qui apparaît
nécessaire, dans À la recherche du temps perdu, Die
Schlafwandler (Les Somnambules) et U.S.A., en raison de son
rapport à la modernité et à l'époque, de son mouvement vers la
totalisation et de sa faculté à approcher la connaissance, par sa
nature fictionnelle même.