Comme nous le savons depuis Aristote, l'homme
est un «animal politique» qui ne peut se réaliser dans
son humanité que par la médiation d'une organisation
sociale, la cité, où les hommes cessent de ne vivre que
pour eux-mêmes, et choisissent librement de substituer
l'intérêt général, parce qu'il est celui de tous, à l'intérêt
particulier, qui n'aboutit qu'à dresser les hommes les uns
contre les autres. Le choix de se donner ainsi un système
d'institutions et de lois qui rende possible la coexistence
de chacun avec tous, et qui garantisse le respect de la
liberté individuelle, prend la forme de l'institution d'un
État, dont l'autorité, expression librement consentie de la
volonté générale, s'impose à tous, et recourt, s'il le faut,
à l'usage de la violence légitime à l'encontre de ceux
qui seraient tentés de dénoncer à leur profit les termes
mêmes de leur engagement dans le contrat social.
Le présent ouvrage examine la question de l'essence
même de l'État, afin d'en montrer la nécessité au regard
du projet politique par lequel l'homme s'efforce de
réaliser dans l'histoire son essentielle liberté d'«animal
raisonnable».