Philosophie
Parce qu'elle semble devoir rester prise entre réalité et idéalité, l'oeuvre d'art n'a été philosophiquement pensée que comme représentation imitative, élan spirituel grevé de matière ou, dans le meilleur des cas, figuration sensible de l'Idée. Mais le meilleur fut aussi le pire : dès lors qu'elle fut vouée à la manifestation de l'Absolu, l'oeuvre dut mourir en tant qu'oeuvre d'art.
Interroger « l'étoffe de l'art », c'est rechercher un autre rapport entre le sens et la matérialité, une autre texture du sens ; c'est entreprendre de penser les oeuvres à partir de leur texture logique propre, et non plus à partir du « grand récit » idéaliste du Sens.
Ce projet suppose une critique des catégories esthétiques usuelles, qui participent d'un univers logique tout à fait étranger à la phénoménalité des oeuvres. Au vrai, l'esthétique philosophique et l'histoire idéaliste de l'art ont toujours déchiré le tissu unitaire de l'expérience artistique.
Cet essai s'applique donc à donner une analyse globale de cette expérience. L'élément ultimement mis au jour s'avère plus « archaïque » que les couples matière/forme, dessin/couleur, sensible/intelligible : c'est l'effet de tache, la résistance de toute oeuvre à l'esthétique qui est alors envisagée.