Je vous écris cette lettre sans
trop savoir à quelle adresse
l'envoyer. Je vous l'écris en
supposant que vous êtes en
route vers votre continent
d'origine.
Afrique ? Asie ?
Je ne sais pas.
Je vous écris quand même.
Je suis le Préfet de Gironde.
C'est à moi que vous devez
votre expulsion du territoire
français.
Vous étiez sans papiers. J'ai
appliqué la loi. Je vous ai
expulsée.
Devant la préfecture, les
piquets de protestation sont
levés. Les comités de soutien à
votre cause sont partis. Les
voix, les invectives, les injures
se sont tues et c'est de la
solitude de mon bureau que je
prends le temps de me poser
pour penser et vous dire
combien je vous tiens rigueur.
Sur mon bureau, il y a des
documents administratifs, des
dossiers importants, de ceux
que l'on retrouve sur les
bureaux des hommes
responsables.
Vous étiez dans l'illégalité, j'ai
pris mes responsabilités.
Au départ, une envie : évoquer un
épisode méconnu de la Seconde
Guerre mondiale, la présence des
Noirs dans les camps de la mort.
En second lieu, une opportunité : le
quotidien communiste l'Humanité
passe, à l'occasion de ses cent ans,
une commande de courtes pièces sur
un fait marquant entre 1904 et 2004.
Ainsi naissent les six premières
lettres.
Enfin, le coup de coeur d'un metteur
en scène pour ces lettres et son désir
d'en faire un spectacle à part entière
en demandant à l'auteur d'aborder
des événements emblématiques plus
récents.
Ainsi est né ce recueil de "lettres à
l'humanité" qui rappelle, tant aux
adultes qu'aux jeunes, parfois avec
humour et toujours avec émotion,
que "l'homme est souvent un loup
pour l'homme".