« [...] on confond le renoncement à son propre isolement, à son particularisme, à l'affirmation et la défense violentes de son identité, avec le renoncement à soi- c'est-à-dire qu'on fait l'amalgame entre le refus de faire mauvais usage de ses poings, et le sacrifice de sa personnalité, de son être singulier. Ce malentendu constitue dans son essence un problème simple, mais qui devient extrêmement compliqué et embrouillé dans la pratique » (Vladimir Soloviev).
Un penseur russe serait-il en avance de plus d'un siècle sur les questions du multiculturalisme et de l'identité ?
Le malentendu est source de vérité, en voici une nouvelle preuve ! Aisance, liberté de ton, grâce narrative, humour, font de ces lettres de petites scènes philosophiques où rigueur dialectique et fantaisie s'allient pour clarifier des sujets qui, plus de cent ans après, brûlent toujours. Intrépide, Soloviev prend le beau risque de tout mettre sur le tapis : la viabilité du christianisme, le rôle de la Russie, Nietzsche et Tolstoï, l'Islam, la guerre, le fondement de l'éthique. Pari tenu : cet homme avait atteint l'unité d'esprit.
Une entrée stimulante dans la pensée de Soloviev, et dans la pensée russe en général : une pensée qui n'est pas sèchement conceptuelle, mais qui prend en compte l'ensemble de la personne, et fait éclater le formalisme occidental.