Ces 45 lettres inédites de Saint-John Perse forment un document
exceptionnel pour la compréhension de l'homme, Alexis Leger,
qui se cache derrière le poète. Écrites depuis les États-Unis entre
1944 et 1957, elles constituent les seules lettres familiales authentiques,
non retouchées, qui nous soient parvenues. Parmi elles, une longue lettre
adressée à sa mère peu avant sa mort, la seule qu'on connaisse.
Saint-John Perse écrit principalement à son beau-frère, Abel Dormoy,
qui veille en son absence sur sa mère et ses soeurs Éliane et Marguerite,
à Paris. Il vit alors à Washington d'un modeste emploi à la Librairie du
Congrès, puis d'une bourse que lui verse la Fondation Bollingen. Il reçoit
également le soutien d'admirateurs américains (dont Beatrice Chanler,
Frahcis et Katherine Biddle, Mina Curtiss). Déchu de ses fonctions en
1940 par Paul Reynaud, puis de sa nationalité par le régime de Vichy,
Alexis Leger a longtemps attendu la régularisation de sa situation administrative.
La gravité de ses ennuis l'a d'abord empêché de poursuivre son
oeuvre poétique et l'on voit comme il en a souffert (onze ans séparent la
publication de Vents et celle d'Amers).
Saint-John Perse ne revient en France pour la première fois qu'en 1957.
Les lettres révèlent avec précision les raisons de la prolongation de son
exil américain. L'année 1951 est décisive : assez brutalement, Alexis Leger
décide de quitter le personnage de diplomate pour devenir pleinement le
poète et futur Prix Nobel de littérature.