Dans les années 1920, a lieu en France un événement littéraire et intellectuel
de première importance : pour la première fois, la littérature et la pensée
contemporaines d'un pays non occidental - l'Inde -, sont considérées
comme une ressource majeure pour penser au présent.
Situé au croisement de l'histoire littéraire et des études postcoloniales, cet
ouvrage montre la manière dont, à l'occasion de la crise de civilisation que
connaît l'Europe après la Première Guerre mondiale, les discours orientalistes
concernant la culture indienne se trouvent contestés par une parole
indienne de plus en plus abondamment traduite et prise en compte (en
particulier celle du premier prix Nobel de littérature non occidental, le
poète Rabindranath Tagore). L'intérêt qu'on porte à l'Inde depuis l'époque
romantique pousse alors à la considérer dans sa tradition spirituelle mais
aussi dans son actualité politique et, en retour, à récuser la supériorité de
la culture occidentale, à dénaturaliser les savoirs occidentaux et à mettre
en cause l'autarcie de la littérature nationale.
Tel est l'objet central de ce livre : indiquer le mouvement par lequel la
littérature et la vie intellectuelle françaises se nourrissent d'apports étrangers,
identifier les résistances que ce mouvement suscite et déjouer la
manière habituellement très franco-française d'écrire l'histoire de la vie
littéraire et intellectuelle nationale.