« J'ai tout appris par la littérature. » Voilà bien une affirmation qui suppose de considérer les usages de la culture sur les plans de son expérience et de ses effets mais qui mérite aussi d'être évaluée quant à la question du savoir.
Conséquence de la diffusion et de la densité de l'offre culturelle qui caractérisent les sociétés contemporaines, le rapport aux oeuvres culturelles s'est progressivement transformé en un rapport expérientiel. L'expérience culture relie est à la fois sous-étudiée, éclipsée par la critique des fonctions sociales de la culture, et sous-évaluée comme paradigme du rapport contemporain à la culture, rapport moins déférent, moins distancié et moins institutionnel. Écoute quotidienne de la musique, visionnage vespéral des séries, lecture immersive, évasive ou édifiante, sociabilité amicale de la sortie au cinéma, pratique familiale de la visite muséale, visites patrimoniales en vacances, moments festivaliers, etc, sont autant d'expériences culturelles retirées de la fréquentation des oeuvres culturelles par les individus. Au point de donner lieu à ce qu'on peut appeler un « paradigme de l'expérience » dans la culture.
Adossé à une enquête de terrain auprès de Français, l'ouvrage examine les dimensions de cette expérience en termes d'attachement, d'intérêt et de savoir. Il traite des conditions et de la différenciation sociale des expériences culturelles, mais aussi de leurs effets sur la connaissance et la transformation de soi et du rapport au monde. Que ce soit en mode mineur de la pratique quotidienne ou en mode majeur de la pratique rare et intense, l'expérience permise par la multiplication de l'offre culturelle et des dispositifs qui n'ont plus le Lieu culturel (avec une majuscule) comme leur lieu de réalisation privilégié (espace dédié, rendez-vous fixe, présence d'autrui, format prédéfini), est l'objet de cet ouvrage.