Lorsqu'en 1850 il publie David Copperfield,
Charles Dickens offre à ses lecteurs le
premier roman qu'il ait écrit à la première
personne, et, derrière l'histoire de son jeune
héros, c'est aussi parfois la sienne qu'on peut
lire. Mais ce que dessinent surtout les douloureuses
premières années, le dur apprentissage
de la vie dans une fabrique, puis la fuite et
l'errance picaresque du jeune Copperfield,
c'est un roman de formation où le personnage
se fait son propre biographe. Il arrive alors
qu'on ne sache pas si le réel évoqué est celui
que l'enfant vécut au présent ou celui que
l'adulte revisite au passé. Car, d'épreuve en
épreuve, c'est une nouvelle image de soi que
le narrateur peu à peu reconstruit, avant
de devenir lui-même, à la fin du livre, un
écrivain semblable à celui qui, dès le début,
a pris la plume pour raconter sa vie - et nous
offrir ce qui est encore aujourd'hui le plus
grand roman anglais du XIXe siècle.