L'extermination systématique des Juifs d'Europe par les nazis occupe une place troublante dans l'histoire de notre époque. Comment décrire un événement aussi horrible ? Le nom même d'Holocauste, dont l'usage ne s'est répandu qu'après 1960, semble vouloir renforcer le caractère intangible d'une expérience extrême qui se situerait pour ainsi dire en dehors de l'histoire.
Pourtant, depuis 20 ans, l'Holocauste est devenu un objet historique, où la rigueur, le détachement et l'objectivité ont pris le pas sur la passion sans nuire à l'émotion retenue. C'est le sujet de ce livre : Michael Marrus dégage les questions essentielles que les débats ont longtemps obscurcies.
Comment la politique nazie a-t-elle évolué vers l'extermination de masse ? Comment évaluer le rôle des collaborateurs (gouvernements et sociétés), mais aussi celui des Alliés, des témoins, des Juifs eux-mêmes ? Que savait-on vraiment pendant la guerre en Allemagne, dans les territoires occupés, chez les Alliés ? Quelle fut la politique du Vatican ? Comment les nazis eux-mêmes négocièrent-ils, pendant et à la fin de la guerre, la fin du martyre juif ? Comment, enfin, écrire une telle histoire, apprécier documents et témoignages ?
Ecrit de manière mesurée et sensible, ce livre accessible au plus large public prend acte, avec lucidité, des progrès de l'enquête où l'intelligence historienne analyse les conditions de l'horreur innommable.