L'aviation a un siècle, et le moins qu'on puisse dire est que la commémoration de l'événement s'est accompagnée jusqu'ici d'une certaine discrétion.
Le philosophe, éternel "rampant", est notamment resté muet. Voler dans les airs, pourtant, n'est-ce pas l'une des victoires humaines les plus étonnantes?
Or pas un mot, pas un, pour célébrer l'inventeur des gouvernes, celui des aérofreins, le concepteur des tuyères thermopropulsives ou l'homme qui, le premier, franchit Mach 1.
Silence, également, sur les mystères de la navigation, l'organisation du trafic aérien, l'espace électromagnétique qui, pour notre plus grande sécurité, s'est progressivement superposé à l'espace réel. De ces réseaux de balises, de radiophares, de satellites, dont nous dépendons maintenant plus que jamais et qui préfigurent - harmonie post-établie - l'espace informationnel que nous habiterons demain, ne fallait-il pas, au moins, dire quelques mots?
C'est pour échapper au mutisme antitechnologique, autant qu'à l'aveuglement phobique qui l'accompagne, que nous avons écrit.
Délaissant le vol rêvé et les images de l'air, nous avons voulu entrer dans le monde réel de l'aéronautique, ses matières et ses moteurs, décrire la navigation, le pilotage, et jusqu'à la conception des avions modernes.
Nous prétendons tirer de là une philosophie de la technique. Et même, si possible, une philosophie tout court. Car la philosophie - la vraie - ne tombe pas du ciel. Elle ne résulte pas de l'inspiration shamanique de quelque supposé génie historico-mondial. Elle ne se déclame pas au café du commerce ou sur les médias, à grands renforts d'effets de manche. Elle se construit patiemment, au contact des mathématiques, des sciences de la nature et des techniques de l'ingénieur.