L’hôpital va mal. Il va mal parce que la société va mal. Et notre société va mal parce que les valeurs collectives sont ébranlées par deux processus simultanés: la technicisation qui libère l’homme de la nature, mais peut le rendre esclave de la technique; la marchandisation qui transforme tout, y compris les rapports humains les plus essentiels, ceux qui engagent la vie et la mort, en un simple commerce.
Enfant des CHU, André Grimaldi ne se résigne pas au renversement des valeurs actuelles qui font du médecin un producteur de soins, du malade un consommateur, de la médecine une affaire. Médecin salarié convaincu que l’application du «juste soin au juste coût» exigée par son éthique professionnelle s’accompagne mal des conflits d’intérêts, l’auteur critique les réformes mises en œuvre qui visent à faire de la santé une marchandise comme les autres et de l’hôpital une entreprise : la tarification à l’activité dite «T2A» qui pousse les médecins à multiplier les actes rentables, le numerus clausus qui a conduit à la pénurie médicale actuelle et à l’importation de médecins étrangers, le développement de consortiums de cliniques privées commerciales, l’arrivée des assureurs privés sur le «marché de la santé». Quel monde allons-nous laisser à notre jeunesse?
À partir de son expérience personnelle, le professeur Grimaldi nous livre de nombreux exemples de cette déshumanisation à l’œuvre dans le service public, très souvent des cas ubuesques qui défient le bon sens. Une autre voie est pourtant possible: un système basé sur la solidarité faisant coexister un service public et un secteur privé à but non lucratif.
André Grimaldi, chef de service à la Pitié-Salpêtrière, est connu pour son engagement contre la réforme actuelle de l’hôpital ; ilest l’instigateur de l’appel du 18 juin 2008 pour sauver l’hôpital public (www.appel-sauver-hopital.fr). Diabétologue, il travaille surles complications du diabète et sur l’éducation thérapeutique du patient.