L'archipel indonésien comprend 17 508 îles et îlots : il regroupe plus de 200 «minorités ethniques» et au moins 300 dialectes et langues locales, sans évoquer la partie (encore) indonésienne de la Nouvelle-Guinée... La République d'Indonésie est en outre le plus vaste pays musulman de la planète. Tout cela est aujourd'hui remis en cause par la fragile ouverture démocratique de cet immense pays à l'allure d'un continent et encore accentué par les événements tragiques ayant mené le Timor-Oriental sur le sinueux chemin de l'indépendance.
Nombreux sont désormais ceux - locaux et étrangers - qui considèrent qu'il vaudrait mieux repartir de zéro et «construire» des Etats-Unis d'Indonésie, avec de petites entités prospères et autonomes, plutôt que de se tenir à l'idée d'Etat-nation d'une Indonésie une et indivisible mais pauvre et instable... Le rêve de grandeur et de puissance s'estompe à la vue de perspectives économiques et sociales plus réjouissantes, mais les tenants de la voie nationaliste semblent encore avoir de beaux jours devant eux. Même s'ils paraissent désormais comptés ! D'aucuns souhaitent une solution russo-soviétique «à la Gorbatchev» là où d'autres s'inquiètent d'une «balkanisation» à l'image de la Yougoslavie démembrée. Le mot «fédéralisme» est sur toutes les lèvres mais rarement de bon cœur. Toutefois, le désir de vivre mieux et en paix l'emporte graduellement sur celui de vivre ensemble à tout prix. Y compris celui de l'horreur, comme à Timor, à Aceh ou aux Moluques...
Engagée sous l'impulsion d'un président élu et authentiquement démocrate, la nouvelle voie indonésienne paraît finalement ouverte tant en direction d'une démocratie «à l'orientale» aux contours encore incertains que vers des lendemains aussi prometteurs que dangereux ! L'Indonésie saura-t-elle définitivement sortir de l'autoritarisme en entrant dans le nouveau millénaire ?