«L'intellectuel se méfie de l'Europe. Tout se passe
comme si le soupçon qui a détourné l'écrivain, l'artiste,
de sa tradition, était en train de gagner sa confiance
dans l'avenir. Sa seule attache à une civilisation, qui a su
faire du culte du changement et de l'inconnu le point de
ralliement d'une culture individualiste, se défait»
André Reszler, par cette recherche des raisons de la
mauvaise conscience européenne qui atteint maintenant
l'intellectuel, nous apporte un éclairage salutaire pour
comprendre les difficultés actuelles de la construction
de l'Europe politique. Il nous montre à travers maintes
références ce qui fait l'esprit européen, curiosité envers
l'autre et intérêt pour la diversité, dont le revers a été le
désir de conduire le monde sous sa surveillance impériale.
Mais l'Europe, elle aussi, a été colonisée plusieurs fois.
C'est pourquoi l'interrogation formulée par André
Reszler est intrigante : comment les petits-fils et arrière
petits-fils d'Osmin et de Sélim ont-ils appris à dépasser la
mauvaise conscience ?
Nous sommes ainsi conviés à chercher comment les
intellectuels européens pourraient, aujourd'hui, réanimer
un sentiment de fierté, une foi dans l'Europe alors que le
monde s'est emparé de ses idées, de ses créations, de sa
philosophie, de son invention de l'individu, de la liberté,
de la démocratie.