À la croisée entre deux logiques disciplinaires, les études littéraires et la didactique de la littérature, cet ouvrage s'inscrit dans une problématique générale de la littérature de jeunesse comme lieu d’exigence et d’émergence des formes, comme lieu d’entrée de l’enfant en littérature. L’œuvre protéiforme de Béatrice Poncelet questionne les théories de références de la critique littéraire, en particulier les théories du texte. Elle se place en effet dans le champ de la critique du rythme qui permet à la poésie de créer un autre réseau sémantique avec et contre le réseau habituel de la langue. Dans une perspective didactique et face au décalage parfois évident entre les goûts des lecteurs experts, des enseignants et des enfants, l’auteure s’interroge sur la réception de ces albums complexes, sur la nécessaire médiation de l’adulte et sur la vocation de l’école à amener les enfants vers ce genre de production. Les expériences de lecture menées auprès d’élèves et d’enseignants de l’école primaire et de SEGPA conduisent alors à faire l’hypothèse que c’est précisément la rencontre avec les supports complexes qui permet aux élèves, y compris disqualifiés en lecture, de se constituer comme sujets lecteurs et, partant, à envisager des dispositifs de formation à la littérature et par la littérature, pour les élèves et pour les maîtres. Dans les albums de Béatrice Poncelet se joue la transmission de gestes humains, mais aussi celle d’une culture artistique, d’une culture littéraire en mouvement. Ce qui se transmet là, ce n’est pas un regard construit sur une culture élaborée mais un mode de lecture et d’approche des textes toujours à refaire, une lecture appropriative et créative. Une écologie de la réception et de l’interprétation du texte littéraire se dessine alors qui questionne la professionnalisation des maîtres.