L'oeil et la plume de richelieu
Correspondances croisées, 1635
Après La Raison de guerre, ce second volume de sources historiques relatives à 1635 pourrait faire de la vision, au sens propre comme au sens figuré, le fil conducteur de ses développements.
Richelieu a l'oeil sur tout et garde, jour et nuit, la plume à la main. Mais il est fréquemment incommodé par des maux de tête si violents qu'il n'est même plus en capacité de lire. Son secrétaire Denis Charpentier se charge, depuis de nombreuses années déjà, de lui faire lecture de l'abondant courrier qu'il reçoit, d'y répondre en imitant son écriture, et de jouer les intercesseurs. Confronter les papiers d'Etat du cardinal-ministre à la correspondance de son « homme de main », son collaborateur le plus proche au quotidien, moins secondaire qu'on ne pourrait le croire, était presque une évidence. Une troisième personnalité joue ici un rôle majeur : le maréchal de Châtillon, placé à la tête des armées de Louis XIII, vainqueur à Avein le 20 mai, puis témoin impuissant du délitement de ses troupes.
À travers les documents que Richelieu, Châtillon et Charpentier ont laissés, s'expriment de multiples regards : les leurs évidemment, au coeur des événements et de la prise de décision, mais aussi ceux de leurs nombreux interlocuteurs, acteurs ou témoins privilégiés d'une année particulièrement tourmentée. Louis XIII relève au printemps la faiblesse de sa cavalerie et souligne l'optimisme exagéré dont Châtillon fait preuve lors de la revue des hommes qu'il doit mener au combat. A l'automne, le Roi, malgré les risques encourus, et en l'absence de Richelieu, s'engage en personne en Lorraine.
Des Flandres aux Pyrénées, de la Bretagne à la Franche-Comté, le crissement des plumes l'emporte pour une fois sur le tumulte des armes, les révoltes populaires et les intrigues de cour.