Il se dit : Je délire. Et en effet, il délire.
- C'est le stress qui me rend fou.
Il panique un peu. Mais il sait que ce n'est pas que ça, qu'il y a autre chose. Et il se demande : Qu'est-ce qu'il fout là ?
- L'éléphant a l'air perdu, seul, la trompe en berne, et personne, je dis bien personne, à part moi, ne semble avoir remarqué sa présence. J'aime beaucoup les animaux, en général. Je regarde beaucoup de documentaires, et je sais donc pertinemment que ce pachyderme est en voie de disparition. Ça m'inquiète. Et en même temps ça m'exalte. C'est exceptionnel, je me dis. Et je me dis aussi que je ne peux pas le laisser là, non je ne peux pas, je dois le ramener chez moi, un éléphant ne peut pas rester en rue comme ça, et si personne d'autre ne le voit, c'est que je dois le ramener, moi.
C'est une prémonition. Un message. Un putain de message.
- Alors je m'approche et je lui dis : Viens. Ganesh. Et il me suit.
D'un côté, un homme, une femme, un enfant ; de l'autre, un père, une mère, un fils. Deux familles, deux situations, un point commun, l'arrivée inattendue d'un élément perturbateur qui bouscule tout : un éléphant d'une part, un moustique de l'autre.
Et voilà que le quotidien se décompose, se délite, se perd en interrogations : Qu'est-ce que je suis et qu'est-ce que je transmets ? Faut-il être celui qui mange, ou celui qui est mangé ?
Tout autour, il y a la ville, le monde qui ne cesse d'opposer sa logique absurde à ce qui pourrait être l'unique nécessité de tout un chacun : partager.
Macadam circus et Qui dort dîne (ou presque) sont comme les deux faces d'une même pièce ; elles se tournent le dos mais ne peuvent se détacher l'une de l'autre.
Avec autant de noirceur que d'humour, dans une langue vivace, Thomas Depryck nous rappelle qu'il n'y a peut-être pas de solution à tous les problèmes, mais qu'il reste toujours la possibilité de se démener pour en trouver.