Madame Marianne
Au début des années 1880, dans le sud de la Suède, Marianne Björk - enfant romanesque d'un chef comptable de la ville - se voit mariée à un riche exploitant agricole. Une fois passée l'euphorie des premiers instants, les réalités de la vie conjugale et la monotonie de la vie campagnarde ne tardent pas à peser sur le moral de la jeune épouse...
Même le bruit d'une voiture dans la cour ne fut pas suffisant pour l'arracher à sa torpeur. Que lui importait qu'il vînt des visiteurs, elle n'en tirerait pas plus de réconfort. Elle détestait ses voisines, Elle détestait leur compagnie, leur façon embarrassante d'évoquer si familièrement leurs histoires de domestiques, de tissu, de rendement du lait et de jardinage ; c'était pire encore que de rester toute seule et d'être incomprise.
Mais elle entendit qu'on marchait dans la maison, qu'on traversait la salle à manger. C'était quelqu'un qui venait à grands pas. Sur quoi, la porte s'ouvrit brusquement. Marianne considéra Börje avec surprise.
Son visage était pâle, mais une lueur d'allégresse et de stupéfaction illuminait ses yeux. Il avait le souffle court, il cherchait ses mots, puis il finit par dire :
- Paul est là !
Paru en mai 1887, ce roman d'apprentissage - souvent décrit comme une variation suédoise de Madame Bovary - fut pour Victoria Benedictsson (1850-1888) une nouvelle occasion de jeter un regard sur la relation de couple. Il fut diversement accueilli par la critique. Encensé par les uns, jugé honteux ou réactionnaire par les autres, la qualité de son écriture n'en fut pas moins saluée par l'Académie suédoise. Il est traduit ici en français pour la première fois.