La réunion en un ouvrage de deux artistes belges parmi les plus justement considérés et appréciés, Hugo Claus et Harry Gruyaert ne peut générer qu'une oeuvre forte et profondément originale. Mais il faut admettre que, ni dans le propos de l'écrivain, ni dans celui du photographe, il n'y a de souci de description ou d'analyse au sens ethnologique du terme. Deux sensibilités se rencontrent, se complètent, quelquefois se heurtent, l'incandescence de la langue rejoignant le fracas des couleurs.
Ce livre n'est pas un témoignage sur un pays dont on a souvent dit les particularités, jusqu'à cette étrangeté que les peintres ont toujours soulignée, de la grande époque flamande à Delvaux ou Ensor.
Ce livre n'est pas un constat, c'est, livré sans contrainte, un poème à deux voix qui dit l'amour-haine que deux artistes vouent au plat pays qui est le leur.
Robert Delpire
Ayant pris la distance nécessaire, je suis retourné en Belgique, comme happé par cette relation amour/haine qui m'emportait. Photographier son pays, en évitant les pièges sentimentaux ou documentaires, n'est pas si simple.
J'ai commencé à travailler en noir et blanc trop mélancolique, pas assez réaliste et, rapidement, ce sont les couleurs qui se sont imposées, devenant évidentes.
Ce que je voulais exprimer prenait forme.
La Belgique est probablement le pays européen qui s est le plus vite américanisé après le guerre d ou la puissance de cette banalité, confrontée au surréalisme et a la force des traditions conservées maigre tout.
Beau, laid, banalité du beau, beauté de la laideur. Ces contradictions sont aussi les miennes.
Harry Gruyaert