Je me sens triste aujourd’hui, envahi par je ne sais quelle terreur vague ; c’est avec un certain effroi que je compte, comme un riche ruiné, ce qu’il me reste d’espérances, et j’ai besoin de me souvenir. Une date, insignifiante pour tout autre que moi, m’a rejeté vers des années non pas oubliées, mais obscurcies, et comme perdues dans la brume. Quelle bizarrerie de ces pauvres cœurs qui sont les cœurs humains ! Il leur faut, pour retrouver une palpitation au service de ce qui les faisait battre autrefois si fort, le hasard d’un anniversaire, un prétexte à évoquer l’amour défunt, l’amitié morte, comme il faut un clou où accrocher un vêtement qu’on ne porte plus.
Fruit d’une sélection réalisée au sein des fonds de la Bibliothèque nationale de France, Collection XIX a pour ambition de faire découvrir des textes classiques et moins classiques dans les meilleures éditions du XIXe siècle.