Simon a un ami. Un seul. C'est à la fois peu et beaucoup. Il a aussi
une femme, Charlotte, encore qu'il semble bien l'avoir quittée pour
de bon au début de ce roman. Simon a tout plaqué un 31 décembre,
tout sauf les souvenirs qui l'obsèdent depuis 1994. Car Simon est un
ancien para. L'un de ceux qui se trouvèrent au Rwanda en ce funeste
6 avril, coup d'envoi de l'une des pages les plus noires de l'Histoire.
En remontant le temps en sa compagnie, le lecteur découvrira comment
Simon a vécu le génocide de 800.000 tutsis et hutus modérés, comment
il a posé des actes qu'il ne souhaitait pas, frotté sa conscience à la
barbarie la plus ignoble, perdu en une nuit l'innocence et le peu de
fierté qu'il avait de lui-même.
Dans ce deuxième roman, Joël Schuermans raconte l'impréparation
des militaires belges, la fascination de l'Afrique, le néo-colonialisme
et les tergiversations onusiennes. Mais aussi - et surtout - il montre
comment un homme se perd au milieu d'un tourbillon de haine, au
point d'oublier lui-même sa propre humanité.
Un récit troublant, dérangeant, d'une puissance dévastatrice et crue,
parcouru par deux figures féminines sublimées, deux anges aussi
différents que les faces d'une même pièce. Un grand roman sur la
condition humaine. Sur l'amour absolu. Sur l'absence d'humanité et
ces amis qui vous rendent la dignité.
Thierry Bellefroid